Culture / Brainans & Jura

MOULIN DE BRAINANS-SCENE DE MUSIQUES ACTUELLES: LES ORIGINES #3

Dans cette série des histoires populaire et culturelle de notre territoire, la rédaction de Trente-neuf degrés a modifié le troisième article après une relecture attentive de Poupoul pour être au plus juste de cette aventure. Nous prions nos lectrices et nos lecteurs de nous excuser pour les erreurs non intentionnelles de l'ancien article.

Le moulin de Brainans - troisième épisode

Poupoul * c’était quoi les débuts du Moulin de Brainans ?
« -On faisait des concours de foot sur du Reggae !!!! »

* ( chargé de production et programmateur du Moulin de Brainans de 1995 à 2006)

A cette période c’était la guerre au Kosovo, alors un coup on avait diffusé Chat noir chat blanc de Kusturica. Il y a 200 kosovars réfugiés à Lamoura, ils étaient tous descendus pour voir le film ; c’était un moment très fort, on avait pu discuter de leur réalité. On faisait musette et pâtisserie le dimanche, tu vois on avait vraiment une volonté de vivre avec tout le monde, que la réputation du lieu soit quelque chose d’ouvert à tous. Le samedi soir, tu avais de la Tek hardcore jusqu' à 6h du mat et le dimanche, on accueillait les grands-parents qui venaient danser sur du musette, c’était un lieu de vie …et on avait besoin de rassurer la population.

Il faut dire qu' à notre arrivée à Brainans lors de notre première réunion au conseil municipal, un pécore nous avait prévenus que les étrangers ici, on les recevait à coup de fusil ! Pan !

On ouvrait toute l'année, ça m' a toujours surpris cette programmation saisonnière SMAC, (on ouvre fin- septembre on ferme mi- décembre on ouvre en février et on ferme mi- juin) sorte de conformisme comme si tout le monde partait l' hiver à Val d' Isère et l' été à la Ciotat. 

SMAC label de l' état pour des salles réservées à la diffusion des musiques actuelles, anciennement CAFE MUSIQUE a été créé en 1990 par Jack Lang à la demande de François Mitterrand pour calmer les émeutes de Vaulx-en-Velin (69). Ce Label nous a été donné par le ministère de la Culture dès le début du projet par Dominique Deshler (habitante de Pupillin) responsable musique et Danse à la DRAC et amie de Chantal Rident Super sympathisante de Promodégel.

Le ministère connaissait déjà nos actions depuis le début des années 80.  On a eu aussi heureusement le soutien du maire de Poligny Jean-Claude Collin qui venait de se faire élire (1994) , communiste ( c' était l' bon temps 😉 ) On ouvrait même le soir de Noël, (le Noël des pauvres ). On faisait des combats de pères Noël, "c'est moi le Père Noël, non c'est moi ! " On y passait du temps, même tout notre temps sans vacances. On faisait 70 dates dans l’année. C’était beaucoup !

Dès le départ, on a voulu se « payer », pas grand-chose, mais ça faisait partie de l’équilibre qui convenait à tous. Vu le peu de subventions il fallait faire tourner la buvette. On avait notre équipe de bar, les services d' ordre perso, les techniciens, le bureau et l' équipe d' entretien et de décoration, une vraie petite entreprise pour un paquebot à manœuvrer.

On avait vraiment une programmation de découvertes! Louise Attaque 20 entrées payantes à leur premier passage, 700 à leur retour au Moulin, à leur demande. Et puis il y a eu le festival malgré lui …Promodégel s' intéressait au spectacle de Rue, depuis sa participation à la Falaise des Fous ( l' Association était responsable du catering uniquement avec de la nourriture fluo) un des premiers festivals de Théâtre de rue (Chalain 1980) et ensuite avec Léon Cavallo (camion scène et parade de rue). On connaissait SmooZ responsable du off du festival Chalon Dans La Rue. Il y avait un festival à la Chaux-de-Fond, qui existe toujours, le festival de la plage des six pompes … le SmooZ filait le tuyau aux compagnies qu’il connaissait c' était sur leur route quand ils descendaient au Festival d' Aurillac, ils s' arrêtaient au Moulin pour poser leur caravane.. Ça a duré deux, trois ans une grosse énergie !

Alors, on s’est dit qu’il fallait l’assumer comme un festival d’art de rue, un festival malgré lui, un festival malgré tout … Didier super, Occupa Mobil, Genre de cirque Manège à JP, Gerald, etc... L’enjeu n’était pas l’argent, on voulait défendre un projet et avoir le soutien du réseau. On a mis plus de trois ans pour acquérir le Moulin. Ça ne s’est pas fait simplement, c’était une vraie aventure, faite de rencontres et parfois de gros coups du hasard. Un avocat qui nous a aidés, un peu à l’improviste. L’achat du Moulin à la vente aux enchères..

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En 1992, on répétait dans une ancienne usine de chaises à Montholier, un endroit collectif où vivait une partie de Léon Cavallo. On parle au Maire de Montholier de notre envie de créer un lieu de diffusion, lui préfère raser l'usine au centre du village et faire un lotissement. Il nous informe que le Moulin de Brainans sera bientôt mis en vente. Promodégel avait son siège social à Poligny, et Filou avait déposé un projet "Un Zenith à Poligny" ! mis à la poubelle direct par la municipalité de Pierre Tinguely, qui nous avait, après le dixième anniversaire de l' Association et 1000 personnes à la salle des fêtes de Poligny, désignés personae non gratae.

C' est Alain Saillard directeur de la MJC d' Arbois qui nous accueille dans ses locaux, et avant la création du Moulin on investit ses bureaux et les caves pleines à craquer à chaque concert. Alain Saillard devient Président de Promodégel.

On connaissait Marcus Rutz, tout nouveau propriétaire du Château des Tourillons à Arbois, un mec qui aimait bien ce qu’on faisait. Il était d’une famille d’entrepreneurs, il avait un peu d’argent beaucoup même. Il est partant pour investir dans un lieu de diffusion, une première vente a lieu au tribunal de commerce de Salins-les-Bains.Comme c’était à Brainans, on décide d’aller rencontrer les élus de la commune pour leur parler de notre projet. Alain Saillard, le directeur de la MJC d’Arbois, rendait la démarche un peu sérieuse. Pour que ça passe mieux, plusieurs d’entre nous nous étions inventé des métiers parce que dans la bande, on était tous artistes. On voulait que la commune nous soutienne si on partait sur un truc comme ça. On rencontre le Maire Mr Breniaux, et quelques-uns de ses adjoints, que nous savions complètement hermétiques à notre projet . Ils nous disent d’aller à la vente, de continuer notre projet, car eux ne sont pas intéressés par l' achat du Moulin.

Lors de la vente aux enchères, on tombe par hasard sur l'avocat d’un copain d'un copain. On discute dans l'escalier, on lui raconte notre envie, on lui explique pourquoi on est là; ça l' intrigue et ça l' intéresse, il a un peu de temps devant lui, alors il vient avec nous. C'est une vente aux enveloppes cachetées dans lesquelles chaque acheteur a inscrit son prix. Il y a 2 autres prétendants et nous. Tiens finalement en 24 h la municipalité de Brainans a changé d'avis et se porte acquéreur du Moulin. Le troisième c’était un marchand de bois ou quelque chose comme ça. La mairie gagne la vente. Merde, on va pour partir. Mais l’avocat qui nous accompagne invoque un problème. Il faut mettre dans les enveloppes un chèque de 10% de la somme proposée, et une mairie doit passer par la perception pour acquérir un lieu, Il a raison ! La vente est annulée !

Un an s’écoule, il faut tenir bon, surtout que le lieu laissé à l'abandon commence à se détériorer. Cette fois-ci, c’est une vente à la bougie chez un notaire de Poligny… 3 bougies, à la fin de la troisième les enchères s’arrêtent. Première bougie, pas de prise de parole, deuxième bougie, une famille de Brainans fait une proposition… Marcus attend la troisième bougie, elle ne dure que 3 secondes et s’éteint, la vente est terminée, le notable de Brainans remporte le bien….

C’était sans compter sur notre nouveau pote avocat. Un défaut de procédure, la vente est annulée, on en reprend pour un an …Marcus Rutz a fini par acheter et arriver au Moulin en avril 1995 à la troisième vente.

Le Moulin est acheté 700 000 francs par Marcus Rutz + 200 000 francs investi par les sociétaires de la SARL Moulin de Brainans; en 6 mois on obtient l'ouverture de la salle de concert (300 places) par la commission de sécurité, 1er concert Zebda, 60 entrées payantes (oups ! ) 2ème concert Les voleurs de Poules (Sanseverino) Complet !Trois ans après en 1998, Marcus Rutz investit à nouveau et la salle passe à 700 places + un restaurant. 355 000 francs étaient versés à l’association après un travail acharné de l’équipe mais ça ne représentait que 25 % de notre budget.

En 2006, Yves-Marie Lehmann, Maire de Poligny de l’époque aide à pérenniser la structure avec la volonté de la communauté de commune de valoriser sa région. Il signe l' achat du Moulin la veille de se faire virer par D Bonnet et son collègue JF Gaillard, ce dernier n' avait mais alors pas du tout l'envie d'investir dans une salle de concert.

Et les Léon Cavallo vous faisiez quoi avant ?
Ah ça c'est encore tout un bout d'histoire....

« Le Pays du Revermont a déposé à la fin de l’été un dossier de candidature au titre du Pôle d’excellence rurale. L’appel à projet lancé par le ministère de l’Agriculture et de la Pêche… »« la volonté est « d’assurer la pérennité du Moulin de Brainans. » Cette Scène de musiques actuelles présente la particularité de faire se produire des groupes, qui émergent ou au contraire qui ont une notoriété nationale ou internationale, dans une salle de campagne. « Il n’y en a pas cinquante en milieu rural », souligne Yves-Marie Lehmann. Les auditeurs viennent de loin pour écouter les concerts. » La voix du jura, 12 oct. 2006

Liens et sources:

https://actu.fr/bourgogne-franche-comte/lons-le-saunier_39300/culture-et-tourisme-federent_14159106.html

https://www.chalondanslarue.com/

https://laplage.ch/le-festival/

https://addict-culture.com/30-09-1998-chat-noir-chat-blanc-emir-kusturica/

https://www.cc-coeurdujura.fr/decouvrir-et-sortir/culture/le-moulin-de-brainans

Les liens vers les articles précédents:

https://trenteneufdegres.fr/article/moulin-de-brainans-un-rassemblement-et-des-revendications-1/

https://trenteneufdegres.fr/article/moulin-de-brainans-le-billet-d-humeur-de-samy-broyeur-2/