Lorsque Danielle Brulebois estime que le béton est plus « recyclable » que le bois

La scène se passe dans les locaux de l'Assemblée Nationale le mardi 2 avril 2024. Une audition du ministre de l'agriculture Marc Fesneau est organisée à propos de la politique forestière du gouvernement. Les députés interrogent le ministre sur la dégradation des forêts, sur la sylviculture, les enjeux autour de la limitation des coupes rases, etc. Le ministre évoque les enjeux de développer le secteur de la construction bois. La parole est alors donnée à la députée de la 1ère circonscription du Jura.

Nous avons retranscrit ses propos :

"Je m’interroge par rapport à la construction bois […] comme un matériau durable […] Est-ce qu’on va raser des forêts pour construire des maisons ? ça m’interpelle. Le bois est-il aussi durable que l’on veut le dire […] alors que le béton, le béton c’est un matériau totalement recyclable, c’est un matériau naturel qui est biodégradable, donc je m’interroge. Est-ce qu’on doit sacrifier nos arbres ?

Moment de gêne dans la salle.

Le Député du Bas-Rhin Vincent Thiébaut prend la parole " Pour rassurer notre collègue, j’invite notre collègue à aller en Alsace. Les maisons en colombage datent de 1300, elles sont toujours debout et elles sont en bois."

Le ministre réagit à son tour : "Si l’idée c’est de valoriser le béton, le jour où le béton prouvera qu’il pourra durer 1000 ans, faudra me le montrer. On sait très bien le bilan carbone du béton. […] Tant qu’à la recyclabilité du béton, ça ne m’avait pas encore ébloui."

En effet.

Voilà qui en dit long sur Danielle Brulebois et sur sa capacité à agir face au réchauffement climatique.

Il y a de quoi être abasourdi par ses propos. Comment est-il possible que cette femme de 76 ans, députée depuis 2017, puisse penser que le béton est plus " recyclable", "naturel" et "biodégradable" que le bois ?

Peut être que les députés macronistes manquent de formation sur ces sujets ou peut-être tout simplement, que leur conscience environnementale s'arrête là où commence l'intérêt des multinationales, notamment du secteur de la construction ?

C'est pourtant de notoriété publique ! Le béton est en effet l'un des matériaux les moins écologiques.

Il nécessite en effet d'importer du sable, de le chauffer via des fours à plusieurs centaines voire milliers de degrés. Si certains déchets du béton peuvent être réutilisés (En 2022, 69 % des PMCB -produits et matériaux de construction du bâtiment - sont ainsi recyclés ou, à défaut, servent de combustible), le modèle de construction actuel qui utilise comme essentiellement le béton est clairement dépassé.

Les trois-quarts des déchets produits en France proviennent en effet des activités du BTP, dont 46 millions de tonnes de déchets du bâtiment générés par les chantiers de démolition (51%), de rénovation/ réhabilitation (36%) et de construction neuve (13%).

Contrairement au béton, le bois est lui écologique !

En plus d’être totalement naturel et totalement biodégradable, le bois est également un meilleur isolant, mais surtout, le bois utilisé comme matériel de construction permet à ce que le CO2 capté par l'arbre durant sa croissance ne soit pas libéré dans l’atmosphère.

Le bois est donc ce qui se fait de plus écolo, à condition évidement que celui-ci soit transformé localement (et pas en Chine) et dans le cadre d'une gestion écologique et renouvelée des forêts, qui se donne comme objectif de défendre les fonctions environnementales et de protection contre les risques naturels de celles-ci, plutôt que sa seule rentabilité financière.

La Vache qui crie